Le sacré en jeu : origines de la motion 107

Le sacré en jeu : origines de la motion 107

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Par Amy Lewis, directrice générale des politiques et des programmes de la Fondation WILD (organisation Membre de l’UICN)

Les sites naturels sacrés sont vitaux à la fois pour la culture et la conservation. Dans cet article, Amy Lewis, directrice générale des politiques et des programmes de la Fondation WILD (organisation Membre de l’UICN), explore les origines de la motion 107 de l’UICN, qui vise à accroître le leadership autochtone dans la protection des paysages sacrés, des espèces et des connaissances écologiques. Soulignant la gestion de longue date du Chef Arvol Looking Horse et des Oceti Sakowin Oyate, l’article montre comment le respect des obligations sacrées et la centralisation de la gouvernance autochtone peuvent sauvegarder la biodiversité tout en préservant le patrimoine spirituel et écologique. 

Chief Arvol Looking Horse addressing the delegates of WILD12, asking them to help protect the sacred

Alors qu’il n’était encore qu’un enfant, le chef Arvol Looking Horse s’est vu confier l’un des objets les plus importants de sa culture et, avec lui, la responsabilité de la protection du sacré. À notre époque, où la capacité d’exploiter et de mercantiliser la nature est plus forte que jamais, c’est une lourde tâche pour n’importe qui, et plus encore pour un garçon de 12 ans.

En tant que 19e porteur de la pipe sacrée de la bisonne blanche, le chununpa le plus sacré des Oceti Sakowin Oyate (les nations Lakota, Dakota et Nakota), le Chef Looking Horse a passé sa vie à contempler le sacré et ses manifestations dans le monde. Il est convaincu que le sacré a besoin d’un espace non seulement dans nos cœurs et nos esprits, mais aussi de manière tangible, dans le monde physique, et il s’engage à défendre cet espace.

Dans le cadre de son travail lors du 12e Congrès mondial sur la nature sauvage (WILD12), organisé à He Sápa, les Black Hills ou collines noires sacrées du Dakota du Sud, le Chef Looking Horse a invité WILD à se joindre à sa mission de créer un espace pour le sacré, et en particulier les animaux blancs qui, dans sa culture et d’autres, sont considérés comme des messagers du monde des esprits, nous rappelant notre souhait d’une vie spirituelle supérieure. 

En partenariat avec le Chef Looking Horse et Phil Two Eagle, l’hôte exécutif du WILD12, l’équipe de WILD a rédigé plusieurs résolutions. La première appelle à la protection des animaux blancs et des espèces sacrées, y compris l’expansion et le renforcement de la bonne gestion des terres par les peuples autochtones afin de répondre au consensus scientifique de garder au moins la Moitié de l’écologie de la Terre intacte, créant ainsi plus d’espace pour que les animaux blancs puissent s’épanouir. La deuxième appelle au respect des traités, considérés comme des obligations sacrées, conclus avec les peuples autochtones pour soutenir la gestion écologique traditionnelle.

En plus de ces deux résolutions du WILD12, les délégués Ernesto Enkerlin, ancien commissaire national de la Commission nationale des aires naturelles protégées du Mexique (CONANP), et Beatrice Padilla, activiste et artiste de renommée mondiale, ont rédigé une résolution appelant à la protection de l’ensemble de la région des Black Hills, sacrée pour les Oceti Sakowin.

WILD a combiné ces trois résolutions en une seule, formant la base de la motion 107 de l’UICN : Accroître le leadership autochtone dans la protection de la biodiversité et du sacré. La Commission des politiques environnementales, économiques et sociales (CPEES) de l’UICN, et en particulier son Groupe de spécialistes de la culture, de la conservation et de la spiritualité, a jeté d’importantes bases éthiques et politiques pour la reconnaissance et la protection des sites naturels sacrés. S’appuyant sur ce travail, WILD a collaboré avec des membres de la CPEES pour développer davantage la motion 107, s’inspirant du dialogue en cours sur les lacunes et les besoins émergents en matière de protection du sacré. Le résultat est la motion 107 telle que proposée aujourd’hui. 

Les principaux appels à l’action comprennent :

  1. Renforcer la reconnaissance des paysages sacrés, et pas seulement des sites individuels, et travailler avec le Comité du Patrimoine mondial des Nations Unies pour améliorer sa capacité à honorer ces lieux.
  2. Créer des directives de gestion pour les aires sacrées dans toutes les catégories d’aires protégées, y compris la catégorie 1A (nature sauvage).
  3. Centrer la conservation des espèces sacrées autour du leadership, des cultures et des systèmes de gouvernance autochtones.

Cette motion intègre également la reconnaissance que les modes de vie autochtones constituent des réservoirs de sagesse et de connaissances écologiques, avec un bilan bien meilleur en matière de préservation des processus écologiques vitaux que la culture contemporaine. Soutenir ces cultures et, plus important encore, les aborder avec curiosité et humilité, pourrait nous permettre d’identifier les valeurs et institutions qui les aident à être des gestionnaires écologiques efficaces, offrant ainsi des modèles dans lesquels nous pourrions envisager d’investir au sein de notre propre culture.

Même si le Chef Arvol Looking Horse ne pourra pas assister au Congrès mondial de la nature de l’UICN cette année, des représentants autochtones feront partie de la délégation de WILD qui défendra cette motion. Nous invitons respectueusement les Membres de l’UICN à se joindre à nous pour protéger le sacré en votant en faveur de la motion 107.

En agissant maintenant, nous affirmons que le sacré compte, non seulement dans l’esprit, mais aussi dans le monde que nous partageons tous.